Comme le disait Aristote, le spectacle de la nature est toujours beau. Et c’est exactement ça, ce mariage entre nature et beauté, qui a changé la vie de Marianne Chouinard, fondatrice de l’entreprise à impact CaCO3 Biotech. Découvrez l’histoire d’une entrepreneure qui n’est pas restée dans sa coquille.

Originaire de la Gaspésie, Marianne est une artiste doublée d’une rêveuse. C’est donc tout naturellement qu’elle a choisi de faire ses études, jusqu’au baccalauréat, en arts. Durant cette période, elle a été mise en contact avec tout ce qui « est beau », les formes, les couleurs, les brillances, etc., et cette beauté, c’est elle qui la fait réellement vibrer.

Une fois le baccalauréat terminé, Marianne a ressenti un grand besoin de revenir à la source, chez elle, en Gaspésie. Étant incertaine des possibilités d’emplois dans sa région et voulant ajouter une corde à son arc, elle a entrepris une maîtrise en administration publique.

Et c’est ainsi qu’elle revenait, munie de diplômes et des rêves plein la tête, enfin à la maison. La réalité, c’est que le retour a été plus difficile qu’imaginé et Marianne a eu le sentiment de ne pas se réaliser à son plein potentiel professionnel. Son besoin de vivre dans la créativité s’est alors exacerbé. Sans le savoir, elle ressentait déjà l’appel de l’entrepreneuriat.

Le temps est donc venu pour Marianne de remettre sa carrière en question. Pour ce faire, elle est revenue à la base, c’est-à-dire reconnecter avec ce qu’elle aime vraiment. Elle aime sa région, sa beauté et ses trésors ; elle aime tout ce qui est simple, comme observer son environnement en marchant tranquillement sur la plage. Et par-dessus tout, elle aime découvrir pour la millième fois les richesses naturelles qui l’entourent. Bref, ce besoin de reprendre contact avec elle-même, avec son essence première, devenait pressant pour Marianne.

Du rêve…

Lors d’une promenade sur la plage, elle s’amusait à observer les coquillages trouvés sur la berge. Et ce qu’elle y a vu l’a fascinée. La nacre, le revêtement intérieur de la coquille de certains mollusques, et ses reflets irisés, a inspiré notre artiste-rêveuse. Tellement qu’elle en a fait un passe-temps. Étudier les coquillages et leur univers était devenu sa passion.

À mesure qu’elle apprenait, la curiosité qu’elle ressentait déjà envers les coquillages s’est décuplée. À partir de ce moment, elle a voulu tout savoir. Que peut-on faire avec la nacre ? Est-ce qu’elle a des propriétés ? Est-ce possible de l’extraire des coquilles ? Etc. Car voyez-vous, Marianne a rapidement imaginé toutes sortes d’utilisations pour cette matière brillante et colorée. De la joaillerie à l’industrie cosmétique, les idées se sont multipliées.

Néanmoins, c’est une rencontre avec une amie qui l’a convaincue de pousser cet intérêt plus loin. En effet, après en avoir discuté ensemble, cette amie lui a dit : « Faut que tu débutes ! Mets-toi en action ! Tu n’as rien à perdre ». 

Il n’en fallait pas plus pour que Marianne saute le pas et fasse les premières démarches qui lui permettraient de valider ses idées. D’ailleurs, ses lectures lui avaient permis d’apprendre qu’en Europe et en Asie la nacre était utilisée dans des produits, la chose était donc possible.

à la réalité

C’est ainsi qu’elle a d’abord trouvé un programme qui donnait le droit d’utiliser les locaux d’un centre de recherches pour une période de 20 heures pour tester une idée. Ce programme s’ensuivit d’un deuxième qui, lui, a donné lieu à une petite subvention permettant un premier vrai projet de recherche. 

Motivée comme jamais, Marianne a demandé un congé sabbatique d’un an à son employeur pour se consacrer à temps plein à ses projets. Après un an, elle obtient une subvention qui lui permet de les lancer. Car, dans sa grande créativité, Marianne n’a pas qu’un seul projet sur la planche à dessin, elle en a trois ! 

D’abord, elle vise le marché des cosmétiques haut de gamme. « Je veux offrir des produits écoresponsables, mais je ne veux pas que ça soit beige ! », rigole Marianne. En produisant des poudres de coquillages, récupérés de l’industrie alimentaire, elle peut ensuite les intégrer dans différents produits cosmétiques. Par exemple, dans un exfoliant pour le corps à base de granulat de coquillage, ou encore dans un fard à paupières irisé grâce à la nacre.

Ensuite, elle souhaite fournir des matières premières à d’autres industries, telles que la joaillerie ou l’artisanat, pour que la nacre puisse être intégrée dans différentes créations telles que bijoux, objets d’art ou objets décoratifs divers. En effet, un procédé d’ingénierie permettant l’agglomération de la poudre de nacre permet de créer des gemmes marines, dures comme le marbre et résistantes, qu’un artisan lapidaire peut ensuite tailler comme une pierre. Une sorte de marbre marin, une matière première innovante, locale et de source responsable, qu’elle a nommée emerGem™.

En troisième lieu, elle voudrait cultiver, et même améliorer, cette fameuse nacre. Développer une nouvelle activité économique d’aquaculture qui consisterait à cultiver les mollusques afin de manger leur chair pour ensuite récupérer la totalité du coquillage qui sera transformé en poudre.

« Cette poudre-là, c’est la base de notre produit. Si on cultive le coquillage, qu’on le mange et que sa coquille intègre ensuite un cycle de valorisation, alors l’entreprise peut s’autoalimenter en matière première. Cela assure un approvisionnement constant, certes, mais garantit également la traçabilité du produit dans le cadre de ce projet d’économie circulaire, un critère essentiel en cosmétique. Additionné à la récupération des matières résiduelles à la source, qui permet de sauver plusieurs tonnes de coquillages de l’enfouissement chaque année, le projet génère un impact positif à tous les niveaux. » Marianne Chouinard, fondatrice de CaCO3 Biotech.

Ces trois projets sont menés de front, mais progressent à différents rythmes. Son projet cosmétique est presque prêt, il reste quelques tests à réaliser. Le volet joaillerie, quant à lui, est rendu au stade de la commercialisation tandis que la recherche et le développement du volet d’aquaculture atteindront l’étape du projet-pilote dès 2025.

Les défis et leurs solutions

Le fait d’habiter en région apporte toutefois son lot de défis. En effet, les centres de recherche, en fonction de leur spécialisation, ne se trouvent pas nécessairement en Gaspésie, ce qui oblige Marianne à se déplacer fréquemment d’une ville à l’autre.

À cela s’ajoutent d’autres enjeux, notamment en ce qui concerne le financement. C’est que la plupart des institutions financières se basent sur les comparatifs et les études de marché pour évaluer le risque associé à un prêt. Or, dans le cas de Marianne et de CaCO3 Biotech, étant en innovation, il n’y en a pas, de comparatifs ! À ce jour, personne n’évolue dans cette industrie, au Québec. 

C’est pourquoi l’entrepreneure a lancé une campagne de sociofinancement pour acquérir, entre autres, des équipements spécialisés qui n’ont pas pu être financés autrement et qui lui permettront d’éliminer la sous-traitance liée à ses opérations.

De plus, elle a su faire appel à toutes les ressources de l’écosystème entrepreneurial à sa portée et a tiré profit de tous les programmes offerts. C’est aussi dans cette optique qu’elle a rapidement rejoint un incubateur d’entreprises (2 Degrés). « En intégrant l’incubateur, à quelles ressources avons-nous accès ? », a-t-elle demandé à l’organisme. « Et je les ai toutes utilisées ! », nous confie-t-elle, ravie. 

Pour elle, cette opportunité s’est révélée la clé, car elle a pu bénéficier de ressources professionnelles auxquelles elle n’aurait pas eu accès autrement. Des avocat·es, des entrepreneur·es, des mentor·es, des coachs, des spécialistes de ci ou de ça et autres ressources essentielles, souvent onéreuses, mises à la disposition des entrepreneur·es, on va se le dire, ça fait toute une différence !  

C’est d’ailleurs l’un des messages qu’elle souhaiterait transmettre aux personnes qui souhaitent lancer une entreprise : « N’hésitez pas à demander de l’aide. Les organismes sont là pour vous aider, mais ils n’iront pas vous chercher chez vous ». 

Jusqu’à ce qu’elle puisse s’offrir un local et l’équipement adéquats, notre entrepreneure s’implique dans toutes les étapes de la transformation d’un coquillage. Et, quand on dit toutes les étapes, on veut vraiment dire « toutes les étapes » ! Elle récupère elle-même les coquillages, obtenus grâce à des partenariats avec l’industrie (restaurants, usines), les nettoie et conditionne aussi elle-même, à la main.

Certes, cette situation évoluera avec l’ajout éventuel d’employé·e, toutefois Marianne a comme objectif de toujours avoir la main à la pâte. Par ailleurs, quand les opérations seront bien rodées et que tout sera mis en place, l’entrepreneure se promet de contribuer aussi à certains projets plus créatifs de l’entreprise — dessiner des bijoux par exemple —, car c’est ce qui fait briller ses yeux de bonheur !

Les valeurs de CaCO3 Biotech sont : La Créativité, Faire une différence et l’Excitation. Ce sont là des valeurs d’entreprise peu orthodoxes. Pourtant, elles sont capitales pour Marianne et elles la définissent vraiment. Par ailleurs, son aventure entrepreneuriale lui a permis de découvrir qu’elle possède notamment une grande débrouillardise, une facilité en gestion de projet et l’esprit entrepreneurial, mais également beaucoup de persévérance. Si l’on combine ses valeurs à ses forces, il devient évident qu’aujourd’hui, Marianne se réalise véritablement.

« Si tu veux quelque chose que tu n’as jamais eu, fais quelque chose que tu n’as jamais fait », affirme Marianne.

Quand le moment sera venu d’embaucher du personnel, Marianne souhaite faire une grande place aux femmes et aux personnes qui souffrent de barrières à l’emploi, pour leur démontrer que ne pas avoir un profil typique, ce n’est pas une finalité en soi. Si l’on se réfère à Marianne, elle a fait des études supérieures, mais travaille dans un autre domaine que celui dans lequel elle a étudié. Ainsi, elle souhaite inspirer les autres à croire en eux et à dépasser leurs limites.

L’entrepreneure l’a dit « Je ne veux pas que ça soit beige ». Croyez-nous sur parole, CaCO3 Biotech est tout sauf beige ! 

Nous lui souhaitons tout le succès possible !

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Marianne Chouinard est accompagnée par Mélanie Marin, directrice régionale de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine. Reconnue pour sa franchise, son écoute et sa bienveillance, cette professionnelle se fait un point d’honneur de bâtir une relation de confiance avec chacune des personnes accompagnées.

Grâce à l’engagement de précieux partenaires : Économie Québec, par l’entremise de son mandataire Investissement Québec, le gouvernement du Canada, la Banque Nationale, la Banque de développement du Canada (BDC), le Fonds de solidarité FTQ et Fondaction, Evol dispose d’une enveloppe d’envergure pour soutenir, par le biais de prêts conventionnels, des entreprises à propriété inclusive et diversifiée, générant des impacts sociaux et environnementaux positifs alignés sur les objectifs de développement durable de l’ONU (ODD).

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