Récemment, nous avons eu le bonheur de nous entretenir avec Camille Therrien-Tremblay, présidente-directrice générale de CAMM construction et de LIB dépanneur. CAMM, acronyme de Construction d’Abris et de Micro-Maisons est une entreprise qui conçoit et construit des mini-unités écoresponsables. LIB dépanneur, quant à lui, est un commerce de proximité, de type dépanneur en libre-service accessible 7 jours par semaine, 24 heures par jour.
Un peu d’histoire
Née à Saint-Denis-sur-Richelieu d’une famille d’entrepreneur·es, Camille a grandi dans le Bas-Saint-Laurent, à Saint-Léandre, près de Matane. Comme la plupart des adolescent·es des régions éloignées, elle a dû quitter son patelin à l’âge de 16 ans pour poursuivre ses études postsecondaires. C’est ainsi qu’elle a entrepris des études collégiales en cinéma. Cursus qu’elle a complété par un baccalauréat en communication avec une spécialisation en gestion de projet de l’UQAM.
Restée à Montréal après ses études, elle y a travaillé à titre de régisseuse de plateaux extérieurs pendant 4 ans. Forte de cette expérience, elle fondait, à l’âge de 21 ans, sa première entreprise qui offrait des services de régie de scène extérieure et intérieure.
L’échec n’est qu’une étape vers le succès
Bien que, comme nous l’avons mentionné précédemment, Camille soit née entourée d’entrepreneur·es, force est d’admettre que sa première expérience en entrepreneuriat n’a pas été couronnée du succès espéré. L’inexpérience, la jeunesse, les mauvaises décisions, plusieurs facteurs ont pu influencer cette situation. Mais celle-ci n’a pas suffi à décourager Camille qui a vécu cette expérience comme un apprentissage. Pour elle, c’était clair qu’elle allait à nouveau démarrer une entreprise. Et cette fois-là, elle s’appuiera sur son expérience passée pour prendre de meilleures décisions et ne pas reproduire les mêmes erreurs qu’elle avait faites dans sa première entreprise.
Cette étape de sa vie a marqué son retour en Matanie. En effet, elle a constaté que le rythme effréné de la métropole ne lui plaisait pas tant que ça. De plus, elle avait le sentiment que, quand le temps viendrait de fonder une famille, c’est chez elle, à Saint-Léandre, qu’elle voulait le faire. Au revoir Montréal !
Entrepreneur·es de génération en génération
Chez les Therrien-Tremblay, l’entrepreneuriat semble inscrit dans l’ADN. Son arrière-grand-père paternel a fondé les marchés Richelieu, son père a fondé la scierie L’Ancèdre sur les terres de sa grand-mère après avoir été entrepreneur en construction à Montréal pendant plusieurs années tandis que son oncle est spécialisé en écoconstruction.
Camille a eu son éclair de génie au moment d’autoconstruire sa propre mini-maison. Elle qualifie elle-même son expérience de facile et plaisante. Presque étourdie par toutes les possibilités qu’elle imaginait pour ces micro-unités, elle savait qu’elle venait de trouver sa voie.
Elle fondait donc, en 2019, l’entreprise CAMM construction inc. qui fabrique en atelier des abris ou des micro-habitats pouvant servir de mini-maison, de mini-chalet, de bureau touristique, de prêt à camper, etc.
Bien sûr, avant de lancer une entreprise, on se positionne sur sa mission, sa vision et ses valeurs. Pour Camille, l’écoresponsabilité de ses produits était non négociable. Il faut dire que ses mentors, son père et son oncle, baignent depuis toujours dans l’écoconstruction, ayant travaillé il y a longtemps avec les architectes qui ont démarré, notamment, la certification LEED pour les bâtiments.
L’écoresponsabilité en matière de construction se traduit par une réflexion constante tout au long du projet. On se questionne sur la durée de vie des matériaux utilisés, on voit à éliminer les pertes de matières premières, on s’assure de la possibilité de récupérer certains matériaux à la fin de la vie de l’habitat, etc. Cette façon de faire demande une plus grande attention, mais le résultat en vaut vraiment la chandelle.
Les micro-habitats construits par CAMM construction sont faits de cèdre à l’extérieur et à l’intérieur. Ça tombe bien ! Son père possède justement une scierie de cèdre et celle-ci est située juste à côté des locaux de CAMM. En utilisant le bois, acheté à proximité de surcroît, Camille réduit fortement l’empreinte carbone de ses projets.
Perfectionniste dans l’âme, notre entrepreneure donne toujours le meilleur d’elle-même. Pour elle, redonner à sa communauté est essentiel. On la retrouve donc sur plusieurs comités, conseils d’administration et autres initiatives du milieu, car selon ses propres mots, tout reste encore à faire dans sa région.
À l’occasion d’une rencontre du comité de développement de sa municipalité, elle apprend que le dernier commerce alimentaire du coin fermera ses portes. Pour se ravitailler, il faut dorénavant parcourir 25 kilomètres jusqu’au commerce le plus proche. Dans la MRC de la Matanie, disons-le, c’est le désert alimentaire.
À la blague, Camille lance « Pourquoi pas un dépanneur libre-service dans une mini-maison ? ». Sauf que cette idée a fait son chemin !
LIB dépanneur
Tellement que Camille a pris le taureau par les cornes et a décidé de s’éduquer sur les commerces en libre-service. En Asie et en Europe, ce type d’entreprise existe depuis longtemps et Camille s’est laissée séduire par un concept suédois.
Les démarches pouvaient maintenant réellement débuter. D’abord, l’entreprise suédoise a été contactée afin de s’informer sur les forces et les faiblesses d’un tel type de concept et différents partenaires, comme la municipalité et la MRC, ont été sollicités pour connaître leur intérêt à collaborer dans ce projet.
Six mois plus tard, le modèle d’affaires ayant été élaboré, Camille décide de lancer une nouvelle entreprise : LIB dépanneur. Notez que ce projet a été financé à 95 %.
« Des programmes d’aide aux communautés existent. Nous avons reçu de l’aide financière et des subventions qui ont couvert 95 % des frais. De plus, la municipalité nous offre un espace de stationnement, déneigement compris, à même le centre communautaire. Il ne reste que l’électricité à payer », confie-t-elle.
Le concept est très simple et offre aux consommateurs et consommatrices deux options de fonctionnement. Face à la porte du magasin, la clientèle avec un téléphone intelligent doit numériser un code QR lui donnant accès au Wi-Fi et ensuite un autre code QR permettant de déverrouiller la porte et d’entrer dans le dépanneur.
Une fois à l’intérieur, les client·es utilisent leur cellulaire pour numériser les codes barres des denrées choisies et les ajouter à leur panier virtuel. Le paiement se fait à l’aide de leur carte de crédit.
Pour la clientèle n’ayant pas de téléphone intelligent ou encore peu confortable avec la technologie, il est possible de se procurer une carte de membre qui donne accès au commerce. À l’intérieur, une borne de paiement, à l’instar d’une caisse libre-service au supermarché, est mise en place et permet de numériser l’ensemble des denrées choisies et de payer avec une carte de débit ou de crédit.
L’avenir est prometteur
Dans la vie entrepreneuriale de Camille, les idées ne manquent pas. En ce moment, elle travaille sur un projet de construction et de fourniture de mini-maisons dans les régions très éloignées comme le Grand Nord du Canada, par exemple, où il manque cruellement de logements.
Parallèlement, elle planifie l’expansion de son atelier qui commence à être petit pour répondre à la demande. Éventuellement, elle se promet aussi de prendre la relève de son père à la scierie L’Ancèdre quand aura sonné pour lui l’heure de la retraite.
Si l’on considère que Camille est aussi maman d’un jeune enfant et qu’elle s’implique encore énormément dans sa communauté, il y a de quoi s’étourdir ! Mais Camille ne changerait de parcours pour rien au monde. Elle est d’ailleurs particulièrement fière d’inspirer d’autres femmes qui souhaiteraient se diriger vers les métiers de la construction. Et tout ça ne serait pas possible sans le soutien indéfectible de son équipe, qui, à elle seule, constitue une de ses plus grandes fiertés.
Si elle avait un conseil à donner à une personne qui a un projet d’affaires, ça serait de croire en ses propres capacités, d’essayer et de prendre une chose à la fois.
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Camille peut s’appuyer avec confiance sur l’accompagnement bienveillant de la directrice régionale du Bas-Saint-Laurent, Nancy Dionne, qui œuvre depuis plus de 20 ans au développement économique et durable de sa région. Reconnue pour sa grande disponibilité auprès des entrepreneur·es qu’elle accompagne, Nancy a un intérêt sincère pour chaque projet qui a un impact sur le paysage économique de sa région.
Grâce à l’engagement de précieux partenaires : Économie Québec, par l’entremise de son mandataire Investissement Québec, le gouvernement du Canada, la Banque Nationale, la Banque de développement du Canada (BDC), le Fonds de solidarité FTQ et Fondaction, Evol dispose d’une enveloppe d’envergure pour soutenir, par le biais de prêts conventionnels, des entreprises à propriété inclusive et diversifiée, générant des impacts sociaux et environnementaux positifs alignés sur les objectifs de développement durable de l’ONU (ODD).