Mélanie Paul a grandi auprès d’un père à la fois entrepreneur et directeur d’une institution financière. Un homme très engagé et impliqué dans sa communauté. « Je me rappelle être assise dans l’escalier et regarder mon père ouvrir la porte de la maison pour aider quelqu’un de la communauté. C’était habituel qu’on vienne cogner à notre porte », me raconte Mélanie.
Ancrée fortement en elle, la valeur de l’entraide l’a amenée à diriger ses études vers le travail social. « Je désirais aider les gens de ma communauté. Je voulais profondément voir disparaître ce mal-être collectif », me confie-t-elle.
C’est alors qu’en 2002 son père lui demande de se joindre à son entreprise afin de prendre en charge plus spécifiquement les ressources humaines. Au cours de leurs discussions, Mélanie réalise que l’entrepreneuriat peut lui permettre de faire une réelle différence dans sa communauté, notamment par les retombées économiques possibles et la création d’emplois de qualité. Faire partie de la relève de l’entreprise devient alors rempli de sens pour elle.
À 35 ans, elle décide de s’inscrire à l’École d’Entrepreneurship de Beauce afin de mieux se connaître en tant qu’entrepreneure. Cette formation s’avère très révélatrice pour elle.
« À travers mon cheminement à l’École d’Entrepreneurship de Beauce, je me suis réconciliée avec ma dualité autochtone/allochtone. Toute ma vie, j’ai senti que je devais choisir entre les 2. Mais je sais maintenant que c’est en fait l’union des 2 qui est ma force. Ça a été long pour moi d’assumer qui je suis à 100 % : l’union des racines de mes 2 nations. »
Mélanie Paul
À partir de ce moment, la mission de vie de Mélanie devient très claire pour elle : créer un pont entre le monde autochtone et allochtone.
Elle comprend aussi que c’est important pour elle que tous ses projets incluent des notions environnementales et humaines afin qu’ils soient des leviers économiques porteurs de sens. Elle est aussi convaincue que la clé du succès passe par la création de partenariats et de collaborations.
C’est ainsi qu’elle crée, avec sa cousine, l’entreprise Akua Nature. Akua, qui signifie prendre soin, avec attention, dans la langue Ilnu. Soucieuse du bien-être de l’humain et de la Terre-Mère, l’entreprise combine la science et le savoir ancestral afin d’offrir des produits qui permettent de prendre soin du corps, de l’esprit et de la nature.
Par la création de cette entreprise, Mélanie souhaite développer des partenariats entre autochtones et allochtones, dans le but de créer conjointement des produits de santé naturels, basés sur le savoir des Premières Nations. Elle souhaite aussi transmettre et partager les connaissances traditionnelles pour assurer la pérennité de la culture autochtone.
Mélanie travaille aussi sur un autre projet d’entreprise : Inukshuk Synergie. Ici, on répond aux besoins spécifiques des communautés et industries des régions éloignées en proposant des solutions énergétiques renouvelables (granules de bois). L’objectif : améliorer l’environnement et mieux gérer le surplus produit par la création de projets porteurs (exemple : chauffage de serres pour l’industrie bioalimentaire).
En plus de développer son sens des affaires, Mélanie a aussi déployé, notamment au cours des derniers mois, ses talents de communicatrice. Souvent appelée à prendre parole dans les médias, à participer à des groupes de discussion ou à des panels lors d’événements, Mélanie est devenue une référence lorsqu’on aborde la réalité autochtone. « Ma mission de vie, c’est de faire le pont entre les 2 réalités et si, pour y arriver, je dois informer, éduquer et prendre parole, je vais assurément saisir les opportunités qui se présentent à moi. Chaque prise de parole éveille les consciences et est une opportunité de reconstruire, se rapprocher », me dit-elle.
C’est d’ailleurs en participant à un panel de discussion qu’elle a croisé madame Danièle Henkel. « Rapidement, on a eu envie de collaborer. Je lui ai parlé de mon projet et elle m’a confié son désir de contribuer à l’épanouissement des femmes autochtones. C’est ainsi qu’est née notre collaboration : un incubateur pour entrepreneures autochtones. On travaille aussi sur une série web qui mettra en lumière la réalité, les défis et les réussites de femmes entrepreneures de la communauté.»
Animée par le désir profond de contribuer à faire évoluer les choses, Mélanie est convaincue que pour briser les systèmes de croyances, il ne faut pas hésiter à remettre en question la vérité de l’autre.« Sa vérité n’est peut-être pas la mienne. C’est en comprenant l’autre qu’on peut construire ensemble. »
« Sa vérité n’est peut-être pas la mienne. C’est en comprenant l’autre qu’on peut construire ensemble. »
Mélanie Paul
Mélanie souhaite un jour être en mesure d’appuyer financièrement d’autres femmes de la communauté dans la réalisation de leurs projets entrepreneuriaux.
Pour Mélanie Paul, le but de la vie est de trouver son don. Le sens de la vie quant à lui, c’est d’en faire profiter les autres.
Vous pouvez suivre Mélanie Paul en lisant ses articles de blogue « Mocassins et talons hauts » publiés dans Les Affaires.